• Actualités

Lecture d'été [9/12] "Moïse d’Egypte" de Nathalie Beaux, la recension du père Sabater

Introduction : 

Nathalie BEAUX, égyptologue, nous propose un livre pour accompagner notre lecture biblique, et plus particulièrement des premiers Livres du corpus vétérotestamentaire.  Elle nous présente un des personnages emblématiques pour les trois grandes religions dites monothéistes : le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam. Il s’agit de Moïse. Il est cité, interprété, prié et étudié par ces Confessions comme évènement central de l’implication d’un dieu avec son Peuple…

L’auteur ne nous présente pas un livre d’études ni un triptyque, ni même une esquisse historico-spirituelle de la vie de ce prince égyptien. C’est un récit romanesque de ce que fut sa vie à la cour du Pharaon, de sa fuite suite au meurtre d’un gardien égyptien, de son exil, de sa vie dans la tribu du Cheikh Jethro et de son mariage avec la fille de ce dernier. Néanmoins, Nathalie BEAUX reste l’égyptologue que nous connaissons… Elle nous ouvre aux sources scripturaires, et nous permet de la sorte de nous plonger dans les trois Traditions spirituelles.

Nombreux sont les auteurs qui ont écrit sur Moïse (Faouzi Skali, Freud, André Neher, Armand Abécassis, Thomas Römer, André Chouraqui, Jan Assmann, Jean-Louis Schlegel…). Chacun a présenté, selon sa culture et ses convictions les plus profondes, Moïse, enfant né des eaux du Nil. Cependant, nous ne savons rien ou presque de sa vie. Souvent on brode. On invente, et l’on est conduit en des endroits qui sont autant d’impasses historiques et spirituelles.

Nathalie BEAUX, égyptologue formée à l’Université de Yale, chercheuse associée au Collège de France et à l’Institut Français d’archéologie du Caire n’est pas une débutante dans le domaine. Elle n’est pas non plus une spirituelle inventant ce qu’elle ne connaît pas. Non. Elle se sert davantage d’un sens aigu, juste et pertinent mettant en mouvement une approche fine et psychologique. On peut y retrouver des accents, ou des touches que l’on a approchées chez André Neher. Moïse y transparaît, ici, avec une épaisseur humaine. Elle fait ressortir également les traits de caractère des principales figures qui peuplent la vie du jeune égyptien découvrant sa judéité.

Résumé : 

L’ensemble du livre nous est servi dans un beau mouvement romanesque et profond mettant au service du lecteur ce qu’il est utile de savoir et de connaître sans pour autant lire des ouvrages spécialisés, sans doute un peu rebutants… L’auteur nous permet de dépasser les simplismes, les idées reçues, les difficultés d’approche de cette figure biblique et coranique. La cohérence qui s’y dégage nous aide, je le crois, à cheminer sur ces chemins d’exil, de violence que connaissent aujourd’hui l’Egypte et la Terre Sainte. Nathalie BEAUX nous aide, d’une façon détournée, à faire se rencontrer les Trois grandes religions aux détours de la lecture de son ouvrage. Moïse un « double national » ? Moïse figure efficace de « l’exilé » et de celui qui est à cheval sur deux cultures ?

Avec une quarantaine de pages techniques et de paracritiques, ce livre écrit comme un roman garde malgré tout cette part (naturelle) marquant sa nature scientifique. Sa lecture m’a rappelé, en quelque sorte, celle d’un bibliste allemand de renom écrivant autour de Jésus : Gerd Theissen, « L’ombre du Galiléen ». Le résultat, captivant, est à verser dans le domaine de l’Autre qui se présente à moi parfois sur des chemins de contradictions. Merci de nous faire entrer dans cette humanité nécessaire !

Nathalie BEAUXMoïse d’Egypte. L’Enfant des trois LivresEd. Médiaspaul. Paris avril 2017. 253 pages. 19 €

Patrice Sabater