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Témoignage de Marie-Caroline, volontaire en Terre Sainte

 

Voilà un peu plus d’un an que je suis en mission envoyée par l’Œuvre d’Orient auprès d’orphelins ou d’enfants placés. Leur nombre varie peu : ils sont toujours entre 40 et 50 à demeurer et presqu’autant viennent à l’école maternelle.

 

Beaucoup m’ont demandé pourquoi rester un an de plus ? Qu’apprendras-tu de plus lors de cette deuxième année ?

 

Aucun me dira que je reste afin de pouvoir dorer au soleil, chatouillée par l’ombre légère d’un dattier avec, en filigrane, une douce voix masculine et mélodieuse fredonnant à mes oreilles la grandeur de Dieu du matin jusqu’au soir.

 

Cela est effectivement l’argument qui a fait pencher la balance, ne nous mentons pas ! Cependant, en Terre Sainte il arrive que le soleil se cache, que les dattiers ne produisent plus de fruits, et que la douce voix masculine ne soit plus si mélodieuse. Et c’est dans ces moments que je me pose comme vous la question : « Mais pourquoi rester ? »

 

Rester signifie prendre le temps de découvrir les petites choses qui font la saveur d’une mission.

 

Grâce au temps qui défile avec une date de fin encore lointaine, j’ai la chance de voir grandir ces petits bouts, de retrouver presque chaque jour la petite bouille rieuse, barbouillée ou en pleurs de certains.

 

Quand je suis arrivée, certains apprenaient tout juste à se tenir sur leurs petites guibolles plus qu’instables, leurs donnant une démarche très aléatoire et assez cocasse. Maintenant les voilà qui font des courses poursuites dans les couloirs et maîtrisent parfaitement le concept de se faufiler entre nos jambes pour aller se cacher et faire des bêtises à l’autre bout du bâtiment.

 

En restant, je prends conscience quotidiennement de ce que nous représentons ici pour ces enfants. Ils se sont autant attachés à moi que je ne le suis à eux. Je peux le constater chaque fois qu’ils m’appellent « M’lie » (prononciation approximative du prénom Marie), même si certains continuent d’utiliser le « Mama » habituel. En effet, nous sommes pour eux une figure maternelle et de référence : quelqu’un qui les gronde quand ils auront fait une bêtise mais qui leur fera un câlin ou leur chantera une berceuse le soir pour les endormir, ou encore la personne qui jouera avec eux comme une grande sœur et qui les soignera comme une maman.

 

Rester permet aussi de se créer une place parmi les employés. Ces dernières voient depuis un certain temps défiler les volontaires et il est difficile de recommencer à créer une nouvelle relation à chaque fois, surtout avec la barrière de la langue, des méthodes de travail et une culture différente. J’ai expérimenté que le temps est le seul allié pour se faire accepter et avoir une relation qui va plus loin que « bonjour » et « au revoir ». Avec le temps, nous avons des souvenirs en commun, des rires, des pleurs et des complicités. Quand on en a assez des enfants qui hurlent ou pleurent, ces moments partagés aident à ne pas tout plaquer, ni se dire « je rentre en France ».

 

En un an, plusieurs enfants sont partis et d’autres sont arrivés. Certains, trop âgés pour rester dans l’orphelinat (qui ne peut les accepter que jusqu’à 6 ans) ont été transféré dans un autre qui les prendra en charge jusqu’à leur majorité. D’autres sont rentrés chez eux ou ont été placé dans des familles. C’est ce qu’on appelle ici une adoption mais qu’en France on nommerait une famille d’accueil.

 

Cette année, même si elle est dans la continuité de l’année précédente, est différente. Je n’habite plus avec les mêmes volontaires, les enfants dont je m’occupe ont changé, les occasions et les sorties évoluent.

 

Grâce à cette année supplémentaire, je me mets au rythme local et j’en profite pour cueillir des instants précieux. Cela rend cette expérience bien trop riche et intense pour qu’une simple lettre puisse la faire entendre.

 

En effet, être volontaire en Terre Sainte est bien souvent résumé par « mais Jérusalem, c’est juste … génial !». Et finalement tout y est dit. Cette Terre qui engendre tant de conflits, tant de questions et de remise en question, sur soi, sur la justice, l’histoire, sa foi et les religions, sur ses valeurs et le sens de la vie, a vraiment quelque chose de mystérieux que je ne saurais expliquer.

 

A présent c’est bientôt Noël, et ma petite ville s’est parée de mille lumières et décorations afin d’accueillir la venue du petit Jésus. Jérusalem quant à elle est illuminée pour Hanouka, une fête juive célébrant la lumière pendant 9 jours. Cela donne un charme certain à ces villes rapidement noyées dans les ténèbres de la nuit et évoque subrepticement les riches décorations dont nous avons l’habitude en France.

 

Ainsi de transats sous les dattiers point à l’horizon, mais du sable, des pierres et des oliviers s’étendent sans fin sous mes yeux écarquillés et plein d’étoiles, les oreilles bourdonnantes de gazouillis (plus ou moins mélodieux) de mes petits bouts de choux.

 

 

 

Marie-Caroline